Lors du conseil municipal du 7 novembre dernier, les élus Gleizé Renouveau ont interpellé M. de Longevialle à propos des derniers rebondissements de l’affaire Metaleurop, à l’origine d’une grave pollution au plomb (et à d’autres métaux lourds) sur tout le territoire de l’Agglo.
Question orale posée par Alain Gay, élu Gleizé Renouveau
Monsieur le maire
Le Progrès a récemment publié une enquête en 3 volets sur les suites de l’affaire Metaleurop. Il révèle notamment – et ce n’est pas une surprise – que la centaine de tonnes de poussières de plomb émise par l’usine pendant 30 ans (chiffres officiels de la DDASS 1999) est toujours présente et continue à intoxiquer la population, dont de nombreuses familles gleizéennes.
Interrogé à ce sujet, le président de l’Agglo reconnait une forme d’irresponsabilité collective, que toute cette affaire été mise sous le tapis, et qu’il est temps de faire toute la transparence sur ce sujet. Il s’est dit favorable à une grande étude épidémiologique, et pense qu’il est encore temps de prendre des mesures, même si celles-ci doivent être couteuses.
Allez-vous, Monsieur le Maire, emboiter le pas à M. Ronzière ? Allez-vous saisir les services de l’État pour demander que des mesures sanitaires soient prises rapidement ? Allez-vous informer la population concernée des risques liés à cette pollution et des mesures de précaution à prendre ?
Par ailleurs, M. Ronzière a également affirmé que l’Agglo allait tenir compte de cette pollution pour l’élaboration du nouveau PLU intercommunal. En tant que Vice-Président chargé de l’aménagement de l’espace, pouvez-vous nous préciser, Monsieur le Maire, les détails de cette prise en compte et quels sont les impacts à prévoir en termes d’urbanisme ?
Réponse du maire (retranscription à partir d’un enregistrement)
« Je voudrais commencer, pour que l’ensemble des membres de notre assemblée ait connaissance de ce dont on parle, par un peu d’histoire. En 1999, le sous-préfet de l’époque, François ?, a réuni les maires d’Arnas, Gleizé et Villefranche, afin de les informer qu’une pollution par des fumées contenant des particules de plomb était apparue, et ça mettait en cause le site de Metaleurop à Arnas ; il avait lui-même à l’époque qualifié la situation de préoccupante. Il a bien entendu alerté l’ensemble des services de l’État, le département, la région, concernés par les domaines de l’industrie et de la santé, afin qu’ils lancent des recherches sur l’analyse des sols, des végétaux, afin de définir le périmètre touché par cette pollution. Il a bien entendu saisi l’usine Metaleurop, fait effectuer des contrôles par la DRIRE (Direction Régionale de l’Industrie, de la Recherche et de l’Environnement), qui a constaté les manquements de l’industriel, notamment au niveau des filtres défectueux sur les cheminées.
Pour ce qui concerne plus particulièrement Gleizé, les prélèvements effectués dans le périmètre touché défini ont fait apparaître des taux de plomb soit supérieurs à la limite de la norme, et il faut préciser toutefois que les vents dominants n’étant pas dans le sens de l’orientation est-ouest – je vous rappelle que les vents dominants sont nord-sud, voire sud-nord, voire ouest, mais rarement dans le sens est – l’impact de la charge de particules était moindre à Gleizé. A la suite le préfet a organisé la tenue d’un CLIS (Comité local d’Information et de Suivi), je dirais plutôt une CLIS car par la suite ce comité s’est transformé en commission, ce qui est la règle pour la surveillance des sites Seveso (ça concerne aussi les centrales nucléaires même si nous n’en avons pas sur notre territoire, les centres de traitement de déchets radioactifs…) Cette CLIS s’est réunie régulièrement pendant plusieurs années, elle a regroupé tous les services de l’État, les maires des trois communes, l’industriel, et des représentants des riverains et d’associations locales.
Entre temps, et rapidement, des préconisations ont été imposées aux élus, et pour Gleizé, un traitement particulier pour l’école de la Chartonnière. Je vous rappelle qu’à l’époque, cette école était districale, elle n’était pas encore dans une gestion municipale mais elle était sur le territoire, et donc conjointement avec le district, il a été mené des actions au niveau de cette école, et notamment le décaissement de plusieurs centimètres de terre qui ont été évacués, puisqu’on parlait de particules de plomb qui se déposaient sur le sol, la couverture des bacs à sable, et l’obligation a été faite du lavage des mains des enfants. Parallèlement, toujours sur notre territoire, un traitement particulier vis à vis de l’Oasis, pour leur partie maraîchage : il leur a été demandé de ne vendre que les légumes qui étaient cultivés sous serre, la culture et la vente des légumes de plein champ étant interdite. De la même manière, des préconisations (et je pense qu’un certain nombre ici s’en souviennent) pour les habitants de ce secteur, de ne pas manger les légumes qu’ils pouvaient produire dans leur jardin potager.
Une vaste opération de recherche de plombémie a été menée auprès de tous les enfants, et notamment de l’ensemble des enfants scolarisés à l’école de la Chartonnière. Cette recherche de plombémie a concerné 696 enfants, et il s’est avéré que 17 cas étaient porteurs d’un taux de plomb dans le sang supérieur à la norme (100 microgrammes/litre à l’époque, qui est devenue ensuite et en 2015, 50 microgrammes), et pour l’école il y a eu deux cas qui se sont avérés porteurs d’un taux de plomb dans le sang qui était supérieur à la norme. Une enquête a été diligentée sur l’environnement qui pouvait intéresser ces deux enfants, et il a été constaté la présence de peinture au plomb dans les appartements, qui pouvait entraîner aussi cet effet de plombémie. Voilà, il faut ramener ça à l’époque, c’est 23 ans en arrière, les peintures au plomb étaient encore assez fréquentes dans les logements, un certain nombre d’usages qui heureusement ont été revus… Je voudrais également rappeler – tout à l’heure on parlait d’engagements de l’Agglomération en matière d’eau – dans la même période, l’Agglomération a lancé une opération d’envergure sur l’ensemble de son territoire (sur la CAVIL, le district) pour supprimer toutes les terminaisons des branchements en plomb dans la distribution de l’eau, qui étaient encore courants à l’époque, c’était une pratique et dans de nombreuses maisons plus âgées, c’était courant d’avoir une partie de la conduite d’eau potable qui était en plomb.
Il faut bien entendre que, c’était son rôle et sa compétence, c’est l’État qui a mené l’ensemble des opérations ; les communes et donc Gleizé, ont exécuté les tâches qui leur ont été demandées, et qui relevaient de leurs compétences. Quant à l’industriel, bien entendu il a été sommé de prendre des mesures. La production a dû être arrêtée pendant un certain temps, et puis l’histoire fait, et je pense que vous le savez, que ça a été vendu, et on a vu l’entreprise Recylex reprendre le site, l’activité, et comme on l’évoquait tout à l’heure, Recylex, dernièrement, a été aussi vendue. Voilà, mais par rapport à l’industriel, ce que je voudrais quand-même rappeler, c’est qu’il appartient aux services de l’État d’assurer le suivi, et je voudrais quand-même vous rappeler les prérogatives des services de l’État : il appartient à l’État la législation de la réglementation relative aux Installations Classées pour la Protection de l’Environnement, il appartient à la Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (la DREAL) ce qui concerne le contrôle des sites soumis à ces règles, et il appartient à l’Agence Régionale de Santé (l’ARS) ce qui concerne la prévention et le dépistage. Donc chacun doit jouer son rôle, et ce que je peux et ce que je tiens à vous dire ce soir, c’est que notre commune a assumé et continuera de remplir sa mission, et moi je souhaite que vous entendiez bien le fait que Gleizé a assumé le rôle qui était le sien, et bien entendu nous continuerons à le faire.
Bien entendu, et là je réponds plus précisément M. Gay à votre question, je partage le souhait du président de l’Agglomération et porte également la demande que soit réunie rapidement la Commission de Suivi de Site, la CLIS, qui ne l’a pas été depuis avril 2018. J’ai eu l’occasion de le dire très dernièrement au sous-préfet de Villefranche, et j’espère vraiment qu’elle le sera avant cette fin d’année. Par contre, je ne dirais pas comme vous que de nombreuses familles gleizéennes continuent à être intoxiquées, par contre je suis partisan de la transparence, qui a été également évoquée par le président de l’Agglo : si une étude épidémiologique doit être lancée, j’y suis favorable, et nous l’accompagnerons, comme nous l’avons fait en 1999. Mais c’est à l’État de prendre la décision, et à l’ARS de l’engager. Ce que je peux aussi vous dire c’est que suite aux articles du Progrès dont vous parlez, nous n’avons eu aucune requête d’aucune famille gleizéenne à la mairie. Par contre pour moi il en va de même pour les analyses de sols dont la décision là encore revient aussi à l’État. Je rappelle que ça fait partie du suivi et que ça a été le cas en 2016 et 2018 à l’initiative de l’entreprise Recylex qui nous avait sollicité pour accéder à des sites communaux, notamment l’école de la Chartonnière. Ces prélèvements sont demandés par les services de l’État, notamment, je fais référence à ce qui nous avait été indiqué par l’entreprise, par le sous-préfet de Villefranche ; ils ont été validés par les services de la DREAL ainsi que par l’ARS. Simplement, et ça malheureusement on ne peut que le déplorer, comme la CLIS ne s’est pas réunie, depuis nous n’avons pas eu connaissance des résultats desdits prélèvements. Je voudrais simplement, et je pense que vous l’avez lu comme moi, vous avez noté que le Progrès a fait lui-même des prélèvements, et qu’il a fait un prélèvement dans le parc de Bois Doré, et qu’il a constaté que ce prélèvement était indemne de plomb, tout au moins en deça du seuil, donc ce n’est quand-même pas inintéressant à entendre, et qui conforte l’idée que nous ne sommes pas sous les vents dominants, et peut-être moins sensibles que d’autres secteurs de l’Agglo.
Alors par rapport à la question de l’urbanisme M. Gay, et donc là en tant que vice-président en charge de l’aménagement de l’espace, je tiens à parler d’une seule voix, donc je vais vous redire ce qui a été dit par le président de l’Agglomération, parce que nous sommes parfaitement en phase sur ces questions-là. Donc vous le savez, notre PLUiH est en cours de révision pour ce qui est de la CAVIL, mais d’élaboration pour ce qui est de l’agglomération, et ce sera une première d’avoir un PLUiH à l’échelle de 18 communes. Il intégrera les éléments dont on a connaissance concernant les sites identifiés en matière de pollution et en tiendra compte dans son volet réglementaire. Bien entendu ce soir je ne suis pas en capacité de détailler, mais cela sera bien entendu comme je viens de vous le dire pris en compte en temps utiles, notamment dans la définition du volet réglementaire. Et je voudrais, pour la parfaite information du conseil municipal, rappeler ce que Pascal Ronzière a précisé lors du dernier conseil communautaire concernant d’autres domaines de compétence de l’Agglo : il a indiqué qu’a été recruté par l’Agglo un chargé de projet santé, qu’il va être élaboré un contrat local de santé de nouvelle génération avec l’ARS, dans lequel la prévention et la veille sanitaire tiendront une place importante, alors même que la santé n’est pas une compétence locale, donc on ne peut que s’en féliciter. De la même manière, la délégation du conseiller délégué chargé de l’environnement a été élargie : il lui a été confié la gestion des risques majeurs, le suivi des sites Seveso et les Installations Classées pour la Protection de l’Environnement. Et troisième point, le Plan Climat Air Energie Territorial (PCAET), qui arrive à mi-parcours, va être évalué et musclé sur les enjeux de santé publique, notamment la qualité de l’air, et il sera évoqué au conseil communautaire.
En conclusion, ce que je voudrais dire, c’est que bien entendu, personnellement, et je pense que je peux vous y associer, je reste très attentif à cette question, et je vous redis que je serai vigilant et que nous prendrons toute la part qui doit être la nôtre, mais nous nous en tiendrons à ce qui nous revient, à nos missions, dans le suivi. Vous l’avez compris, pour l’heure, nous pressons les services de l’État, seuls compétents en matière de santé publique, de nous donner des informations, des instructions pour agir, et je terminerai en vous disant que j’ai eu, comme je vous l’ai indiqué, très dernièrement le sous-préfet, qui est mon interlocuteur par rapport aux représentants de l’État, et qui m’a indiqué qu’il y aurait très prochainement une réunion pour évoquer ce dossier à la demande du préfet. Voilà ce que je voulais vous répondre M. Gay »
Bien évidemment, cette (longue) réponse mérite des commentaires, tant elle est empreinte de mauvaise foi, de demi-vérités, d’esquives et d’aveux. Ces commentaires figureront dans un dossier complet, à paraître prochainement sur ce blog.
(photo : Pierre Comet, journaliste au Progrès, effectue des mesures de plomb dans le sol, et trouve des résultats très supérieurs au seuil d’alerte)