Plan de mandat et orientations budgétaires : les élus de l’opposition débattent en Conseil d’Agglo

CONSEIL COMMUNAUTAIRE DU 25 FÉVRIER 2021

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I- Présentation des orientations générales du plan de mandat

Intervention d’Emmanuel Dupit (Cf. vidéo ci-dessous à 53’42)

Monsieur le Président, cher.es collègues,

Nous souhaitons d’abord saluer la démarche de présentation de ce plan de mandat, qui nous offre pour la première fois l’opportunité d’un échange autour de l’avenir de notre agglomération et des objectifs qui guideront notre action durant la mandature, et nous vous remercions pour cet exercice de démocratie. Il nous semblerait cependant nécessaire d’élargir cet échange et cette réflexion à l’ensemble des citoyens, dans une optique de démocratie participative qui fait aujourd’hui défaut dans le fonctionnement de notre collectivité.

En ce qui concerne le contenu de ce rapport, votre constat initial nous interroge sur deux points essentiels :

  • quels éléments concrets vous permettent d’affirmer que notre agglomération est « un territoire qui vit bien » sur le plan social ? Les indicateurs socio-économiques dressent un tableau plus sombre de la réalité : selon les statistiques de l’INSEE, les principaux indicateurs (taux de chômage, revenu médian…) sont plus défavorables pour le territoire de la CAVBS que la moyenne nationale.
  • Vous pointez à deux reprises les risques liés à la polarisation métropolitaine. Il nous semble que notre territoire devrait au contraire mettre en avant sa nécessaire complémentarité avec la Métropole : complémentarité économique, notamment entre une agriculture de proximité que notre agglomération peut offrir, et un potentiel d’emploi industriel et tertiaire lié à la proximité de la Métropole ; complémentarité au sein du réseau de transports en commun, dont la redéfinition doit être un des axes forts du mandat ; complémentarité également sur la question du logement, pour éviter la résidentialisation de notre territoire que vous évoquez. En résumé, nous devons donc d’une part cesser de vivre dans la crainte d’une absorption progressive et construire des synergies positives avec notre puissant voisin, mais aussi développer une image dynamique de l’Agglomération pour accroître son attractivité non seulement dans le Rhône mais aussi hors du département, prioritairement sur les secteurs industriels de pointe et les activités tertiaires.

Nous tenons ensuite à dire que nous partageons globalement les orientations que vous définissez, et à souligner un certain nombre de points positifs dans les intentions, comme l’accent mis sur la transition énergétique ou les mobilités.

Mais au-delà de ces constats et interrogations, nous souhaitons à notre tour contribuer au débat et enrichir ce plan de mandat en donnant notre vision de ce qui devrait guider notre action pour les cinq ans à venir. Cette vision, qui s’appuie notamment sur le Pacte pour la transition que nous avons signé l’an dernier, c’est une ambition pour une Agglo volontariste, solidaire et fédératrice.

Une Agglo volontariste, c’est une collectivité qui, comme vous semblez le souhaiter vous aussi, ne se contente pas de gérer l’existant, mais qui décide sans attendre d’entamer une transition nécessaire pour un développement durable :

  • sur le plan écologique : en se dotant d’une politique volontariste de réduction des déchets, et non pas seulement d’optimisation de leur collecte et de leur traitement ; de soutien actif aux mobilités alternatives, appuyé sur des mesures fortes et concrètes (gratuité du réseau de transports en commun ; développement, mise en cohérence et en sécurité du réseau cyclable dans le cadre du Schéma Directeur Vélo), ou encore en se fixant l’objectif de faire de l’Agglo un Territoire à Énergie Positive à l’horizon 2050, ce qui nécessite l’élaboration d’un plan d’action pour initier une démarche proactive
  • sur le plan économique : en renforçant l’attractivité de notre territoire par la diversification et la promotion de son image aujourd’hui très centrée sur le tourisme et la viticulture qui restent néanmoins essentiels, en créant de l’emploi dans des filières porteuses et innovantes (les très dynamiques services aux entreprises, les très innovantes industries en lien avec l’isolation et la rénovation thermique du bâtiment), en promouvant une agriculture paysanne de transition, et en optimisant et en réorientant la composition des zones industrielles et commerciales existantes plutôt que de multiplier les zones « classiques » dont l’offre ne correspond plus aux attentes des habitants
  • sur le plan démocratique : en favorisant l’implication active des citoyen.nes dans la vie et les choix de la collectivité, par davantage d’information et de concertation sur les grands projets à venir, ou encore l’instauration de budgets participatifs à même de fédérer la population autour d’un projet partagé.

Une Agglo solidaire, c’est une collectivité qui prend soin :

  • de ses populations : en luttant contre les effets de la crise sur les plus précaires par une politique ambitieuse en matière d’emploi, de rénovation urbaine et de logement social, et une tarification progressive pour l’ensemble des structures de l’Agglo (le Nautile par exemple), en assurant l’accueil digne et humain des populations fragiles comme les sans domicile ou les migrant.es (en partenariat avec un réseau associatif riche et actif) mais aussi des Gens du voyage (création d’une aire en conformité avec la loi, et nous saluons dans ce domaine vos intentions de mettre fin à une situation indigne)
  • de ses ressources : en assurant la gestion directe de ses biens communs, et en particulier de la ressource en eau, précieuse et menacée, mais aussi en préservant les ressources foncières indispensables au développement d’une filière agricole durable de proximité
  • de son cadre de vie : en maîtrisant l’urbanisation par une densification et une répartition équilibrées sur l’ensemble du territoire du parc de logement mais aussi de l’immobilier d’entreprise, et en prenant mieux en compte l’impact des activités industrielles sur la santé des populations (risques industriels comme ceux liés à l’activité de Rhône Saône Engrais, suivi de la pollution aux métaux lourds issue de l’activité de Metaleurop établie par l’enquête DDASS de 1999, ou des rejets de l’incinérateur de Béligny)

Une Agglo fédératrice, c’est une collectivité qui crée du lien :

  • entre les différentes communes qui la composent : en créant des synergies et des solidarités permettant un développement économique harmonieux à l’échelle de l’Agglo, et notamment le maintien de l’activité économique de proximité et des services publics dans les communes rurales
  • entre ses différents quartiers, urbains comme ruraux : en redéfinissant l’offre de transports en commun, en complémentarité avec l’offre ferroviaire, afin d’irriguer l’ensemble de notre territoire, y compris dans ses parties les plus enclavées, pour permettre aux habitants de bénéficier des opportunités économiques, touristiques et culturelles offertes par ces espaces
  • entre ses habitants : en favorisant les rencontres et les échanges par le soutien aux associations, notamment sportives, et par des initiatives culturelles portées par la collectivité et des structures dédiées (en remplacement du CCAB que l’on a laissé disparaître), comme un festival itinérant qui parcoure les quartiers urbains et les villages ruraux de notre territoire pour proposer des spectacles issus de différents champs artistiques, en lien avec les associations locales

Voilà brièvement exposée notre vision d’un mandat ambitieux et novateur pour le développement de notre agglomération. Cette vision dépasse la seule déclaration d’intention, et s’appuie sur des orientations claires et des mesures fortes. Elle n’est pas seulement celle d’un futur souhaitable, elle nous est dictée par l’urgence climatique, l’urgence sanitaire et l’urgence économique et sociale qui en découle, mais aussi par l’urgence démocratique.

Monsieur le Président, cher.es collègues, durant les cinq années à venir, nous porterons cette vision par une opposition constructive et responsable, mais déterminée, parce qu’il est urgent d’agir.

Pascal Ronzière répond que nous ne partageons pas les mêmes avis sur ces sujets. Il rappelle que la Métropole représente à la fois un atout et un risque ou un sujet de complexité. Atout car c’est un territoire dynamique sur le plan économique, et beaucoup d’entreprises sous-traitantes de notre territoire travaillent pour des entreprises de la Métropole, à quoi s’ajoutent les trajets domicile-travail entre nos territoires. Il considère que l’Agglo n’a pas vocation à devenir le jardin ou le dortoir de la Métropole, et défend la vision d’un territoire d’équilibre, c’est à dire qui continue à développer son activité économique industrielle, artisanale, de services pour offrir des emplois à ces nouveaux habitants. Il ajoute que la construction du plan alimentaire territorial est un vrai sujet, sur lequel il travaille avec le département, pour coordonner l’offre des différentes intercommunalités et pouvoir discuter avec la Métropole qui a besoin de nous pour nourrir ses habitants. Il considère qu’il y a aussi des sujets de complexité, sur lesquels il travaille avec le président de la Métropole, notamment sur les mobilités dans le cadre du SYTRAL, et qu’il est prêt à discuter d’une nouvelle relation entre les intercommunalités et la Métropole. Mais selon lui, la Métropole prend des décisions qui nous impactent, comme la restriction de l’accès automobile à Lyon, sans réelle concertation. Il se dit donc prêt à réinventer la relation avec la Métropole en défendant sa vision et ses convictions.

Sur la démocratie participative, il considère qu’en tant qu’élus, nous devons porter une vision politique du développement de ce territoire, ce qu’il fait à travers ce plan de mandat, fruit d’une concertation avec les maires et l’exécutif de l’Agglo. Après, une fois que le cap est tracé et les objectifs fixés, sur un certain nombre de projets, la concertation avec les habitants sera « évidemment » organisée avec des dispositifs innovants mais très simples. En effet, il dit ne pas être favorable aux budgets participatifs, et pense que c’est  de la responsabilité des élus de définir la ligne politique qu’ils veulent tracer et la façon dont elle doit se concrétiser sur le plan budgétaire. Par contre, sur des grands projets d’aménagement et des objectifs de développement, il souhaite organiser la concertation et le travail avec les acteurs associatifs et économiques du territoire.

Sur les ressources foncières, il affirme être pour un développement maîtrisé du territoire, et dit que si on laissait faire les choses, elles se feraient car des entrepreneurs, des habitants et des promoteurs sont prêts à investir dans l’Agglo. Notre responsabilité est de savoir comment développer le territoire et protéger nos ressources et nos espaces qui deviennent de plus en plus rares. Des contraintes sont imposées par la loi dans le cadre de la « zéro artificialisation nette », qui obligent à faire des choix et ne permettront pas de mener tous les projets qu’il souhaiterait mener, raison de plus selon lui pour être exigeant sur le plan environnemental et architectural, les espaces devenant des richesses.

Cette délibération ne donne pas lieu à un vote.

 

2.1 Rapport d’orientations budgétaires 2021

Intervention de Danielle Lebail (Cf. vidéo ci-dessous à 1h37’52)

Je vous remercie, Monsieur le Vice-Président, pour cette présentation, et je remercie les services pour ce document complet et explicatif sur de nombreux points, qui permet à des néophytes comme moi de l’être un peu moins. Mon intervention s’inscrit pleinement dans le débat que nous venons d’avoir, et dans l’intervention de M. Dupit.

Je m’étonne cependant qu’on en reste à de bonnes intentions avec des chiffres (pour préparer un budget certes indispensables) mais qu’on n’ait pas aussi des éléments plus précis sur notre territoire : statistiques sur la situation de nos entreprises, de l’emploi, des déplacements (ceux en train et dans l’agglo), de la situation sociale de nos habitants, des attentes et des besoins, voire des demandes des communes.

La suppression définitive de la taxe d’habitation et les dispositions de la dernière loi de finances font de 2021 une année charnière pour les finances des collectivités locales. En réduisant le pouvoir des collectivités locales pour lever l’impôt, les mesures de la dernière loi de finances accentuent un mouvement engagé depuis plusieurs années et qui semble remettre en cause le lien fort établi entre la décentralisation à la française et l’autonomie fiscale des collectivités. Nous le regrettons dans une période ou le lien de proximité s’est renforcé, et où l’on a beaucoup fait appel aux collectivités locales pour faire face aux conséquences de la crise.

Il faut aussi évoquer le plan de relance et regarder ce qui se dit nationalement : j’ai vu des maires en colère car très peu d’argent était destiné aux communes, et beaucoup pour les entreprises, même si nous sommes conscients que le soutien aux entreprises était essentiel en temps de crise.

Je voudrais ensuite souligner la bonne situation financière, peut-être due à l’action « tranquille » de ces dernières années, et proposer qu’on ait davantage recours à l’emprunt (emprunt à taux zéro actuellement). Nous sommes très loin des seuils d’alerte (solvabilité à 1,3 année pour 2021, le seuil d’alerte étant à une dizaine d’années). Il il y a en effet de la mauvaise dette et de la bonne dette, celle qui permet d’investir sur notre territoire et relancer l’économie locale.

Je souhaiterais aussi poser une question : les baisses de revenus du Nautile sont-elles intégralement supportées par l’agglo,que dit la Délégation de Service Public ?

Au-delà de ces constats, remarques et interrogations, je souhaiterais aussi faire des propositions, que nous porterons avec M. Lici et M. Dupit dans les commissions :

  • pour une Agglo qui s’engage complètement dans la transition énergétique, après une année exceptionnellement chaude : un plan de rénovation énergétique des bâtiments publics, une étude sur la gratuité des transports en commun, l’extension et la sécurisation du réseau de pistes cyclables, la création d’aires de co-voiturage (pour regarder différemment notre relation avec la Métropole et appuyer sa politique de réduction du nombre de voitures), l’investissement dans le soutien à l’égriculture locale et bio ou raisonnée, par des acquisitions foncières ou des aides directes, ainsi que la réservation de marchés pour l’approvisionnement des crèches communautaire par exemple
  • pour une Agglo plus solidaire : la création d’une crèche hors Villefranche, qui permettrai aussi aux habitants des autres communes de ne pas avoir, à prendre leur voiture (on agit donc sur l’écologie et le social), une étude sur la rénovation du quartier de Béligny, la construction de logements sociaux en aidant les communes à se mettre en conformité avec la loi, la construction rapide d’une aire d’accueil pour les Gens du voyage
  • pour une Agglo plus démocratique : je veux dire que c’est un sujet très important, une question qui nous est posée à nous élus, quand on voit le taux de participation aux élections, et je ne suis pas sûre que les citoyens de notre Agglo aient bien compris qu’ils nous ont élu. Ils ont élu des conseillers municipaux, et d’ailleurs on a beaucoup parlé de projets municipaux, mais a-t-on parlé de grands projets de l’Agglo qui concernent leur vie quotidienne ? Finalement très peu. Je pense donc que leur donner la parole, leur permettre de mieux connaître les actions et les compétences de l’Agglo, les faire réfléchir ne serait-ce qu’une fois par an, par des réunions publiques, d’abord par exemple sur votre plan de mandat, et permettre de l’infléchir, ce n’est pas se déjuger. Nous avons des idées, nous les portons, nous avons des valeurs, nous venons de les défendre avec M. Dupit, pour autant, les mettre en débat dans la population, et lui permettre de prendre une part active dans la construction du plan de mandat, c’est un des moyens pour réconcilier les citoyens avec la politique dans ce qu’elle a de plus noble.

Gilles Duthel, Vice-Président en charge des finances, répond à propos du Nautile que les contrats passés avec le délégataire imposent à l’Agglo de fournir un matériel qui doit répondre à certaines exigences, et en cas de modifications en cours de contrat, notre responsabilité peut être engagée ou non. Ainsi, par le passé, il y a eu des problèmes de structure qui ont affecté l’exploitation et obligé à verser des indemnités au délégataire. Ici la situation est différente car elle n’est pas de notre fait mais de force majeure, mais il faudra discuter avec le délégataire pour répartir les répercutions, dans des proportions qu’il est incapable de donner.

Pascal Ronzière remercie Danielle Lebail pour ses propositions, dont certaines rejoignent les orientations du plan de mandat, notamment autour de la transition énergétique et du covoiturage. Il rappelle qu’il croit au covoiturage, et que quatre aires sont inscrites dans les orientations du plan de mandat.

Sur les logements sociaux, il affirme que les communes se mettent en conformité avec la loi par des programmes en cours, et qu’il souhaite réfléchir à une autre forme d’engagement pour l’habitat, autour de l’aide à la rénovation énergétique et à l’adaptation des logements privés, notamment dans le campagnes mais pas seulement, ce qui sera l’objet de débats en commission et en conseil.

Cette délibération ne donne pas lieu à un vote.

 

6.2 Nouveau réseau de proximité des finances publiques du Rhône – Autorisation donnée au Président de signer la charte d’engagements

Intervention d’Emmanuel Dupit (Cf. vidéo ci-dessous à 2h06’35)

Monsieur le Président,

La charte d’engagements, qui nous a été transmise à notre demande il y a quelques jours, suscite un certain nombre d’interrogations et de remarques  :

  • Le paragraphe 3 nous informe que cette charte entérine la carte des implantations du réseau des finances publiques jusqu’en 2026, alors que le document annexe ne porte que sur 2022-2023. Qu’en est-il pour la période 2023-2026 ?
  • N’apparaît pas dans ce document, l’évolution nette en nombre d’heures ou en jours de présence entre la période actuelle et la période concernée par la charte pour chacune des fonctions décrites
  • Enfin, alors que l’introduction du document affirme que « cette démarche […] doit permettre, en rupture avec les pratiques précédentes, d’inscrire durablement ces services dans les territoires », l’essentiel des services semblent rester localisés à Villefranche, et aucune implantation d’accueil de proximité ne semble prévue dans les communes rurales de l’ouest de l’Agglo, contraignant une nouvelle fois les usagers à prendre leur véhicule pour accéder au service public, et en éloignant nos concitoyens les moins mobiles (aînés par exemple).

Pourriez-vous donc nous préciser combien de lieux supplémentaires sont ouverts par rapport à l’existant, sur quels sites, combien d’heures, quelles plages horaires ?

Pascal Ronzière répond qu’il n’a pas tous ces détails, que cette charte nous est proposée par la Direction Générale des Finances Publiques comme à l’ensemble des intercommunalités, et que l’analyse qui a été faite va plutôt dans le sens d’un renforcement de l’offre pour notre territoire. Il ajoute que l’accueil de proximité va être complété par une participation  de la DGFIP aux espaces France Services de Villefranche et par une présence à Gleizé, et qu’en matière de réorganisation des services de l’Etat, on regrette souvent les fermetures de site ou la réduction des effectifs, ici la présence de la DGFIP sur le territoire est confortée, avec en plus le nouveau rôle d’un conseiller auprès des communes qui est intéressante.

Danielle Lebail, Vassili Lici et Emmanuel Dupit s’abstiennent sur cette délibération