Mis en cause par un article publié par Le Progrès de Villefranche, intitulé “Metaleurop : la campagne de dépistage est-elle pertinente ?”, les élus de l’opposition réagissent.
L’article rédigé par Pierre Comet tendrait à convaincre la plupart des lecteurs que les élus d’opposition ont eu tort de réclamer une analyse des cheveux pour l’enquête sanitaire menée par l’ARS, dans le cadre du suivi des risques d’exposition au plomb autour de l’ancien site industriel Metaleurop. Mais si l’on y regarde de plus près, cet article est plein d’imprécisions et il oublie de poser quelques bonnes questions.
D’abord, contrairement à ce qui est écrit dans l’article, nous n’avons jamais dit que l’analyse des cheveux était « plus précise » que la plombémie sanguine, seulement qu’elle rendait mieux compte des pollutions anciennes accumulées dans l’organisme, et qu’elle permettait de détecter une imprégnation à différents métaux lourds, et pas seulement au plomb. Nous avons également reconnu la possible difficulté d’interprétation des résultats des analyses de cheveux, faute de seuils de référence reconnus par les autorités sanitaires françaises*. C’est pourquoi nous avions demandé une analyse de cheveux en complément, et non à la place de la plombémie.
Ensuite, un des arguments utilisés par le docteur Cheymol pour disqualifier l’analyse de cheveux comme méthode « pour préserver la santé publique » nous parait pour le moins curieux. En effet, il affirme que « ce qui est primordial, c’est la dynamique. C’est de suivre l’évolution des dosages immédiats afin de s’assurer que la contamination n’augmente pas ». Soit, mais cette réserve est tout aussi valable pour la plombémie sanguine… Ce qu’il confirme ensuite en reconnaissant que les résultats provisoires de l’enquête, qualifiés de « rassurants » par le préfet, restent « une image à l’instant T susceptible de varier ». Ce que l’on aimerait savoir, c’est si les personnes testées et dont la plombémie est par exemple supérieure à 10 µg/L ont été conviées à effectuer de nouvelles analyses, précisément pour mesurer cette possible évolution.
On ne peut que regretter finalement le caractère erratique des campagnes de vigilance au regard du plomb dans le périmètre concerné et menées depuis plusieurs décennies. Le suivi à long terme sur lequel insiste le docteur Cheymol n’a pas été appliqué à la première cohorte d’enfants détectés en 1999. Nous avions demandé lors de notre rencontre avec M. le Sous-Préfet que les services de l’État se lancent dans une analyse de tendance de la plombémie sur la population exposée, construite sur des bases scientifiques tangibles. Cela nécessite évidemment d’analyser finement les études précédentes ainsi que de mettre en œuvre un protocole sérieux et périodique prenant en compte les déplacements de population. A ce jour notre demande est restée lettre morte.
Enfin, une autre affirmation du docteur Cheymol a retenu notre attention : « ces premiers résultats tendent à penser que les environnements directs des 200 enfants testés sont peu contaminés en plomb. Toutefois, rien ne dit que ces enfants habitaient dans les lieux les plus pollués ». Or là non plus, le préfet n’a annoncé aucune procédure de recoupement des résultats des enquêtes environnementale et sanitaire. Un bon sujet pour un nouvel article du Progrès ?
Emmanuel Dupit et Alain Gay, élus de Gleizé
Vassili Lici, Michèle Montagnier, Etienne Allombert et Marie-Jeanne Ribeiro, élu·es de Villefranche S/S
Thierry Girardot, élu de Limas
* l’analyse de cheveux en remplacement de la plombémie est une pratique courante dans certains pays, comme le Canada, où elle est considérée comme une “méthode sensible et efficace“. Lire ici un article de 2018.
[photo : Jennie Christensen, du laboratoire TrichAnalytics, suit au long cours les travailleurs d’une fonderie]