Pollution au plomb : nous voulons être informés, pas rassurés !

Communiqué de presse d’élus d’opposition de Gleizé, Villefranche et Limas

C’est un classique de la communication des pouvoirs publics : infantiliser la population, considérée comme ignorante et craintive par nature. Quand par exemple les citoyens s’opposent à une réforme qu’ils jugent contraire à leurs intérêts, il faudrait faire de la « pédagogie », parce qu’en fait, « ils ne comprennent pas ». Et quand ils s’inquiètent de la pollution industrielle dans leur cadre de vie, il faut avant tout les « rassurer », car bien sûr, il n’y a aucune raison d’avoir peur.

Lors du point presse organisé par la sous-préfecture de Villefranche le 17 janvier dernier, à propos de la future campagne de dépistage du saturnisme à Arnas, Gleizé et Villefranche, le maître mot était donc de « rassurer » la population. C’est ainsi que Marielle Schmitt, de l’Agence Régionale de Santé (ARS), a déclaré au micro de Radio Calade que depuis 2001 les émissions de polluants étaient « moins conséquentes » et qu’aucun cas de saturnisme n’avait été déclaré ces dernières années.

Peut-être faudrait-il rappeler deux faits que Mme Schmitt ne peut pas ignorer.

  • La première est que les centaines de tonnes de poussières de plomb émises avant l’arrêt de l’activité de fusion de Metaleurop sont toujours présentes sur le sol de l’agglomération. Qui connaît un tant soit peu la question sait que le plomb, métal lourd, ne migre pas.
  • La deuxième est que la campagne de dépistage organisée l’an passé dans le Nord Pas-de-Calais a été ordonnée suite à la diffusion du film « Les enfants du plomb », bien qu’un seul cas de saturnisme avait été déclaré dans le secteur concerné lors des 10 dernières années. Alors que seulement 15% de la population cible a fait analyser son sang, 8 cas de saturnisme ont été détectés (plombémie > 50 µgL-1), ce qui rapporté à l’ensemble de population cible pourrait dépasser les 50 cas (lire ici). Quand on cherche, on trouve…

Autre problème avec cette campagne : la méthodologie. En France, seule la plombémie (taux de plomb dans le sang) est associée à des valeurs de référence et des seuils réglementaires. Or il suffit de consulter la littérature scientifique pour comprendre que la plombémie reflète surtout une exposition récente au plomb, et ne renseigne pas sur la charge corporelle des polluants présents dans les organismes. Comme cela se fait dans de nombreux pays – au Canada par exemple – nous demandons que l’analyse des cheveux soit utilisée. Les cheveux conservent des traces plus anciennes et leur analyse permet de mettre en évidence l’accumulation de plomb au cours du temps. Cette méthode semble quand même plus indiquée pour mesurer les effets d’une pollution que Mme Schmitt décrit elle-même comme étant ancienne.

Enfin, on peut également s’interroger sur l’absence de recherche d’autres métaux lourds, comme le cadmium ou l’arsenic, qui ont eux aussi été abondamment disséminés par la cheminée de Metaleurop.

Alors que les résultats des analyses de sols publiés le 23 janvier confirment la persistance d’une pollution (11 des 20 échantillons prélevés dépassent le seuil de vigilance, dont un dépasse le seuil d’alerte), nous nous adressons à l’ARS, au sous-préfet, au président de la CAVBS et aux maires des 3 communes concernées pour leur demander de cesser de vouloir « rassurer » les habitants de l’agglomération. Les citoyens ne sont pas des enfants, leurs craintes sont fondées, et les pouvoirs publics n’ont que trop tardé à les écouter. Nous leur demandons également d’exercer leur devoir d’information en organisant une réunion publique et en publiant le compte-rendu de la Commission de Suivi de Site qui s’est tenue le 20 janvier. Il n’y a pas de démocratie sans transparence, en particulier quand c’est la santé qui est en jeu.

Emmanuel Dupit et Alain Gay, élus de Gleizé

Danielle Lebail, Étienne Allombert et Michèle Montagnier, élu·es de Villefranche

Thierry Girardot, élu de Limas