Intervention d’Emmanuel Dupit, élu Gleizé Renouveau, au conseil communautaire du 6 mars 2024
Monsieur le Président,
Depuis plusieurs années, les habitants de notre territoire de confession musulmane alertent sur l’absence de solution pour l’inhumation de leurs défunts. Cette problématique a été mise en lumière au moment de la pandémie de Covid 19, qui a provoqué une augmentation de la mortalité, et renforcé les difficultés à rapatrier les corps des personnes décédées dans leurs pays d’origine, ou celui de leurs parents.
Car il convient de rappeler que les personnes dont nous parlons sont dans leur immense majorité des citoyens français, égaux en droits à chacun d’entre nous, et dont le principe de laïcité impose le respect des croyances et des pratiques, dont les rites funéraires sont un aspect important. Quant à ceux qui n’ont pas opté pour la nationalité française, il s’agit pour la plupart de ceux que l’on appelle aujourd’hui chibani, ces hommes venus bâtir notre pays et participer à sa croissance durant les Trente glorieuses, et désormais bien mal récompensés de leur labeur, au moment de quitter le monde des vivants.
Pour les familles musulmanes endeuillées se pose ainsi un réel dilemme au moment du décès de leur proche : espérer qu’une place leur soit accordée dans un cimetière de la région possédant un carré musulman (c’est le cas à Belleville-sur-Saône, dans l’agglomération lyonnaise ou à Bourg-en-Bresse), mais ceux-ci sont bien souvent saturés ; faire rapatrier le corps du défunt à des milliers de kilomètres, solution parfois complexe administrativement et toujours coûteuse ; ou se résoudre à renoncer aux dernières volontés du défunt en le faisant inhumer hors d’un carré musulman, donc en contradiction avec ses croyances.
Le 19 avril 2003, lors du vingtième rassemblement de l’Union des Organisations Islamiques de France, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, avait déclaré : « je pense encore au problème des carrés musulmans dans les cimetières qui suppose que vous puissiez définir avec les maires ces emplacements. Chacun doit pouvoir enterrer ses morts, les prier, les honorer, les aimer dans le respect de sa religion et de sa culture. Devant la mort, nous sommes tous égaux. La peine d’un musulman est la même que celle d’un catholique, d’un juif ou d’un protestant . » En 2008, sous la présidence du même Nicolas Sarkozy, une circulaire de la Ministre de l’Intérieur Michèle Alliot-Marie incitait les exécutifs des collectivités locales à créer des carrés confessionnels dans les cimetières dont ils avaient la charge. Cette circulaire confirmait ainsi l’attachement des musulmans de France à leur pays, qui se traduit par la volonté d’un nombre croissant d’entre eux de reposer en terre française, ce dont nous devrions être fiers.
Or aujourd’hui, notre territoire ne compte pas suffisamment d’espaces permettant de regrouper les sépultures des défunts de confession musulmane, malgré une pétition ayant rassemblé plus de 2600 signatures, et qui était adressée à notre collectivité en avril 2020. Seule une petite partie du cimetière paysager leur est dédiée, ce qui est bien insuffisant au regard de la demande. C’est pourquoi nous souhaiterions savoir quelles réponses la CAVBS est en mesure d’apporter aux demandes de nos concitoyens musulmans.
Voir l’intervention d’Emmanuel Dupit et la réponse de Pascal Ronzière, président de l’Agglo, à partir de 1:38:40
Article du Patriote Beaujolais : Les musulmans beaujolais en peine pour enterrer leurs morts
[Photo d’illustration] : Carré musulman de la nécropole nationale d’Amiens, Claude Villetaneuse, CC by sa, Wikimedia Commons